Cette performance «au long cours» a consisté à séjourner durant une année chez des particuliers de Clermont-Ferrand et sa région. Je séjournai 1 mois dans chaque foyer avant que mes hôtes ne me redirige vers d’autres personnes. Cette expérience s’est faite dans le cadre d’une résidence à Vidéoformes et fut marquée par deux expositions :


  1. -Exposition au Musée du Ranquet (Clermont-Ferrand) : présentation du web-r site

  2. -Exposition et banquet-happening à la chapelle de l’Oratoire (Clermont-Ferrand)

 

Valentine Cruse, "Retour aux sources", Catalogue du festival Vidéoformes, Clermont-Ferrand, 2004.


Projet web’r site :  Musée du Ranquet- mars 2005


Installation consistant à disposer dans un espace circonscrit des photographies (30 x30) prises dans différents intérieurs, afin de re-créer non plus un foyer mais l’expérience d’une traversée, d’une suite d’hébergements au domicile de particuliers.

Ces photos sont autant de boutons (de page, de site web), de liens vers d'autres sites, ceux qui m’ont accueillie.

L’installation tente de restituer un espace domestique, transversal et utopique... mais elle fait aussi un état des lieux de cette résidence d’artiste débutée en septembre 2004 avec Vidéoformes.


Banquet-happening à la chapelle de l’Oratoire- galerie l’art du temps-sept 2005


Deux espaces sont aménagés : l’un public, ouvert à tous dans lequel sont présentés les photographies, quelques vidéos et des textes tirés du dictionnaire philosophique de la vie domestique que j’ai écrit durant la résidence, un banquet et des espaces de convivialités, des salons, ... ; l’autre privé, réservé aux personnes qui m’ont accueillie. Espace de privilégiés et gérés par ces privilégiés. Ceux du réseau, qui m’a prise en charge. Un repas plus conséquent leur est proposé. Marché noir, tentative d’ouverture de la frontière, mais il n’y aura pas à manger pour tous... certains proposent d’aller chercher du pain chez eux, d’autres préfèrent rester assis et garder leur siège. Réflexion sur l’hospitalité.

Sur des Dazibaos, possibilité est donnée de manifester sa révolte contre l’injustice !


catalogue : L'Utopie domestique - Objet(s) de la rencontre, catalogue de la résidence d'artiste de Pascale Weber à Vidéoformes de sept. 2003 à sept.2004, Textes de G. Soucheyre, D. Gigoux-Martin, G. Pons, R. Duclos, B. Boussagol, J. Manzi, Èd. Un- Deux- Quatre, Clermont-Ferrand, 2004.(76 p.)


la valise était entreposée chez les particuliers qui m’accueillaient durant un mois. Certains l’ont customisée, ont ajouté des objets pour ceux qui leur succèderaient...

Performance  (+résidence- expo- installations)

En quête de vérité, l’artiste aventurière, Pascale Weber, arrête sa course et pose son bagage pour explorer l’intime. […] Accueillie quelques jours, d’un foyer à un autre, depuis septembre, son voyage, pourtant, continue : À la découverte des particuliers, de  leur maison, leur vie…

Telle une peintre d’intérieur, Pascale note, photographie, filme le quotidien de ses hôtes, et renouvelle ainsi, en conquérante, la tradition des scènes de genre. Son regard précis, attentif, donne valeur et poésie aux documents glanés.


[…] Une  valise, aménagée comme un petit intérieur, accompagne ses déplacements. Au fil des semaines, son contenu évolue :  une fillette lui donne des décalcomanies pour la décorer, une femme de vieilles dentelles de famille… Invité à contribuer, l’hôte devient, à son tour, acteur, visiteur d’un site, créateur d’un musée portatif.

Instants précieux, secrets enfouis, souvenirs de vacances…, les histoires s’accumulent.

Objets, espaces et temps privés s’exposent, prennent la parole. Pascale, notre conteuse, tisse les liens entre art et vie. D’autres l’ont fait, elle cite : Fluxus, Kurt Schwitters, Boltanski, Annette Messager, Jonas Mekas, Mona Hatoum, Sophie Calle... se réfère à l’exposition Peintres du Nord en voyage dans l’Ouest (1860-1900), visitée au Musée des Beaux-Arts de Caen, l’été 2001.

Mais que voulez-vous faire chez nous ?

Observée, sublimée par l’affect, l’imaginaire, la cellule domestique reflète ses habitants, comme leur lien avec le dehors. À la fois miroir et fenêtre ouverte sur le monde, l’habitat raconte ses propriétaires. Si la démarche intrusive de Pascale Weber peut atteindre la pudeur, elle n’est pas voyeuriste, et interroge l’existence, sa re-présentation, ses valeurs. Besoin de revenir aux sources, à l’origine, au foyer, la mère. Grâce à Pascale, l’art ouvre la porte, permet l’accueil, la rencontre, définit une place à table, favorise la communion...

Faut-il donc prétexter l’art pour goûter au partage ?


Valentine Cruse, Retour aux sources…(Turbulences Vidéo #65, Décembre 2003)

« Pascale Weber arrive chez vous, dans votre famille. Elle pose une petite valise bleue, déjà encombrée des objets donnés par les autres familles.


Parce qu’il y a eu d’autres familles : 12 familles en 12 mois. Pascale Weber s’installe chez vous avec discrétion, mais le calme et l’organisation de la famille sont modifiés, l’artiste fait difficilement parti d’un quotidien... Paradoxale situation, où l’artiste cherche à se fondre dans un quotidien qui n’est pas le sien, et où une famille cherche à observer et comprendre un champ d’action qui n’est pas son quotidien. Et puis, petit à petit, l’artiste trace son territoire, celui d’un espace artistique, à l’intérieur de celui de la famille par définition déjà bien établi et conservateur.

Dés le début l’artiste prend beaucoup de photos des objets de la maison. Elle se limite à ne prendre en photo que ces petits bouts du quotidien ; et l’on aime à penser que Pascale Weber, tout comme le héros de Mystery train de Jim Jarmush, ne photographie que ce qu’elle va oublier... et l’artiste capture par petits bouts des représentations de cette vie de tous les jours. Décloisonnés de leurs contextes familiaux, les objets retombent dans le schéma artistique de la nature morte, et ne sont un lien affectif et de mémoire que pour l’artiste et la famille concernée. Le travail de Pascale Weber, dans cette résidence, oscille entre deux mémoires, l’une privée et l’autre publique en référence avec le monde de l’art ; deux territoires définis que l’artiste cherche, non pas à confronter, mais à vivre. Il ne s’agit pas là d’une curiosité malsaine ou d’une morale familiale appliquée à l’encontre de l’artiste, mais d’établir des territoires, d’action et de réflexion, souples, dont les frontières imperméables rendent possible la rencontre. Il convient alors d’admettre que l’intimité est le meilleur champ d’investigation. Et l’intimité crée le privilège.

Cependant, Pascale Weber à la fin de l’année expose les travaux nés de cette résidence. Elle rend donc publique son expérience et ses rencontres familiales et offre son espace de création à tous les regards. Les familles successives se retrouvent réunies autour d’un banquet, que l’artiste, en bonne hôtesse, a préparé avec soin. Cette partie de l’exposition est un espace privé et construit à l’intérieur de l’exposition.


Ne peuvent goûter au banquet que les familles d’accueil ! Luxe et privilège !

Des territoires sont remis en place dans l’espace - au départ neutre - de la salle d’exposition, et chacun recherche son espace, son territoire dans celui de l’artiste. La situation est renversée, l’artiste pique la curiosité du spectateur et l’incite à participer à la création : il fait désormais parti du champ artistique, et cherche pour lui-même son propre territoire et sa définition.»


© Delphine Gigoux-Martin, Pascale WEBER, géographe du quotidien

(L'Utopie domestique - Objet(s) de la rencontre, catalogue de la résidence d'artiste de Pascale Weber à Vidéoformes de sept 2003 à sept.2004, éd. Un- Deux- Quatre, Clermont-Ferrand, 2004.76 p.)


J’ai endossé le rôle de représentant en art domestique et me suis fait héberger durant une année chez des particuliers puis j’ai organisé un banquet-happening.

(catalogue)